Un calendrier incompatible avec la mise en place prochaine d’une "Grande Sécu"
Qu’en est-il vraiment de ce projet de "Grande Sécu" ? A-t-il des chances de voir le jour ? Il est peu probable que cela soit dans un futur proche. Il ne reste que quelques mois avant les prochaines élections présidentielles.
Le délai est donc trop court pour lancer une réforme d’une telle envergure, surtout que celle-ci ne remporte pas beaucoup d’adhésion que ce soit auprès des complémentaires santé (ce qui est logique) mais aussi des professionnels de santé.
Toujours est-il que le projet d’une "Grande Sécu" pourrait s’inviter dans les thèmes de campagne des futures élections présidentielles ou du moins alimenter le débat sur le système actuel de santé dont de nombreuses difficultés ont été accentuées par la crise sanitaire actuelle.
Pourquoi ce projet d’une "Grande Sécu" est-il apparu dans l’actualité ?
La nationalisation des remboursements de santé qui résulterait de la mise en place d’une "Grande Sécu" a fait couler beaucoup d’encre depuis le mois de juillet 2021. On peut légitimement s’interroger sur les raisons qui ont poussé Olivier Véran à évoquer ce scénario et à encourager le HCAAM d’étudier particulièrement cette piste parmi les 4 scénarios envisagés dans le cadre du rapport sur la réforme de la complémentaire santé.
Ce coup de pression mis sur les organismes de complémentaire santé qui devraient revoir leur modèle économique si ce dispositif voyait le jour est-il une réponse aux hausses tarifaires dénoncées par le gouvernement ?
Pour rappel, il avait expressément demandé aux complémentaires santé de ne pas répercuter le coût de la réforme 100 % Santé et de la taxe Covid sur les cotisations. La menace d’une augmentation de cette dernière a également été brandie. Finalement le gouvernement a décidé du maintien du montant initial de la taxe Covid pour 2021. Mais ce rappel à l’ordre des complémentaires santé n’est pas passé inaperçu.
A l’heure actuelle, il semblerait que le projet de "Grande Sécu" ne soit pas à l’ordre du jour, ce dispositif étant trop complexe à mettre en place en si peu de temps. Mais surtout, il a suscité de nombreuses réactions négatives.
Les multiples réserves face à cette centralisation des remboursements de santé
Le projet d’une "Grande Sécu" consisterait en une gestion de l’ensemble des remboursements santé par la sécurité sociale. Les complémentaires santé n’interviendraient alors que pour les soins ou les actes non remboursés comme les dépassements d’honoraires, les implants dentaires, les médecines douces ou certains médicaments.
Le risque d’une santé à deux vitesses est mis en avant par la FFA (Fédération française de l’assurance). Elle explique que les Français les plus riches pourront compléter leur prise en charge avec des garanties offertes par des contrats individuels plus onéreux ou consulter des professionnels de santé libéraux avec dépassement d’honoraires.
Mais les populations les plus fragiles se retrouveraient limitées dans le choix des praticiens et devraient faire face à une prise en charge moindre pour certains actes non remboursés par la sécurité sociale.
Le système actuel est composé d’un socle obligatoire qui assure aux patients une prise en charge minimale de leurs dépenses de santé à un taux supérieur à de nombreux pays (la plupart des dépenses de santé sont remboursées à hauteur de 70 % en France) et d’un complément de remboursement assuré soit par les mutuelles obligatoires collectives soit par les mutuelles individuelles.
Cette répartition permet d’offrir aux Français une certaine flexibilité et personnalisation de leur couverture santé. Ils sont libres de souscrire des garanties afin de privilégier certains postes de soins par rapport à d’autres.
Pour aller plus loin : le coût social d’une telle réforme
Ce projet de "Grande Sécu" était vendu comme une source d’économies de 5,4 milliards d’euros selon le HCAAM. Mais ce chiffre ne prend pas en compte l’intégralité des taxes payées par les organismes de complémentaire santé ni le coût social d’une telle réforme.
Transférer la gestion de l’ensemble des remboursements santé à la sécurité sociale nécessiterait l’embauche d’agents publics. Mais est-ce que cela pourra compenser les pertes d’emploi générées dans le secteur privé ? On parle ici de plusieurs dizaine de milliers d’emploi selon la FFA.
Nul doute que la remise du rapport de la HCAAM en janvier prochain sur la réforme des complémentaires santé suscitera de nouveau de nombreuses réactions.