Que sont les coûts cachés de santé ?
Les restes à charge invisibles, aussi appelés RACI, correspondent à l'ensemble des dépenses de santé qui ne sont pas prises en compte dans les statistiques officielles. Contrairement aux restes à charge "visibles" qui concernent les frais partiellement remboursés par la sécurité sociale ou les complémentaires santé, les RACI englobent toutes les dépenses qui ne bénéficient d'aucune prise en charge, même partielle.
Les restes à charge officiels, mesurés par la DREES (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques), s'élèvent en moyenne à 274 euros par an et par personne. Pour les personnes en affection longue durée (ALD), ce montant grimpe à 840 euros.
Mais lorsqu'on ajoute les coûts cachés, la facture totale dépasse largement les 2 000 euros annuels pour les patients atteints de maladies chroniques ou en situation de handicap.
L'enquête identifie 9 grandes catégories de dépenses constituant ces coûts cachés, allant du petit matériel médical aux médecines complémentaires, en passant par l'adaptation du domicile ou les frais de transport.
Des montants variables selon les profils
Avec 1 557 euros en moyenne par an et par personne, les coûts cachés de santé représentent une charge considérable. Ce montant équivaut à plus d'un SMIC mensuel net (1 426 euros) et dépasse largement l'Allocation aux Adultes Handicapés (AAH) qui s'élève à 1 016 euros.
Cette somme a augmenté de 50% par rapport à une précédente enquête menée en 2019, qui évaluait ces coûts à environ 1 000 euros par an. Pour les 10% de personnes les plus touchées, la facture peut même grimper jusqu'à plus de 8 200 euros annuels.
Les patients les plus impactés par ces coûts cachés sont ceux en situation de handicap moteur (2 535 euros en moyenne par an) ou psychique (1 999 euros) ainsi que les personnes souffrant de douleurs chroniques (1 972 euros).
Les personnes en ALD ne sont pas épargnées avec un reste à charge invisible moyen de 1 623 euros par an, auquel il faut ajouter les 840 euros de reste à charge officiel, soit un total de 2 463 euros annuels.
Parmi les dépenses les plus fréquentes, on retrouve :
- les médecines complémentaires et la santé mentale (64,2% des répondants) ;
- le petit matériel médical (54,6%) ;
- l'alimentation spécifique et l'activité physique adaptée (53,1%) ;
- les frais de transport (48,8%).
Côté montants, les postes les plus onéreux sont :
- l'adaptation de l'environnement (324 euros en moyenne) ;
- les médecines complémentaires (310 euros);
- l'alimentation spécifique (256 euros).
Quels sont les principaux déterminants des dépenses de santé ?
Les coûts cachés de santé sont principalement déterminés par quatre facteurs :
- la nature et la sévérité de la pathologie (les handicaps moteur et psychique générant les dépenses les plus importantes),
- le niveau de revenus du patient (qui conditionne sa capacité à assumer ces frais),
- le lieu de résidence (avec des variations importantes entre régions)
- l'âge du patient.
L'absence ou l'insuffisance de couverture complémentaire adaptée constitue également un facteur aggravant, notamment pour les médecines complémentaires et l'adaptation du cadre de vie.
Des conséquences majeures sur l'accès aux soins
L'impact le plus direct de ces coûts cachés est le renoncement aux soins : 53,2% des répondants indiquent avoir dû renoncer à des soins ou produits non remboursés pour des raisons financières.
Les renoncements concernent principalement :
- les médecines complémentaires (68,1%) ;
- des produits et soins non remboursés (44%) ;
- l'alimentation spécifique (43,9%) ;
- les médicaments prescrits mais non remboursés (41,1%).
L'analyse des données met en évidence un "gradient social" inquiétant : il existe un seuil de revenus, situé autour de 2 000 euros mensuels, en dessous duquel le taux de renoncement aux soins augmente drastiquement.
Ainsi, parmi les personnes gagnant plus de 3 000 euros par mois, seules 27,3% déclarent avoir renoncé à des soins, contre 68,8% chez celles gagnant moins de 1 000 euros mensuels.
Au-delà du renoncement aux soins, ces coûts cachés ont un impact considérable sur la qualité de vie des patients. Sur une échelle de 0 à 10, les répondants évaluent l'impact financier de leur maladie sur leur qualité de vie à 6/10 en moyenne.
Quelles solutions face à ces coûts cachés ?
Le PLFSS 2025, adopté le 17 février, fixe les dépenses de la sécurité sociale à plus de 666 milliards d'euros, avec un déficit social record de 22,1 milliards d'euros. Si la baisse initialement envisagée de la prise en charge des consultations médicales et des médicaments ne figure plus dans le texte adopté, d'autres mesures d'économies sont maintenues, comme la baisse du plafond des indemnités journalières.
Face à cette situation, France Assos Santé appelle les pouvoirs publics à développer des politiques facilitant l'accès aux soins pour tous, promouvoir la prévention et améliorer la pertinence des soins.
Dans ce contexte, le choix d'une complémentaire santé adaptée apparait crucial.
Si la majorité des frais invisibles reste exclue des contrats standards, certaines mutuelles proposent des forfaits spécifiques pour les médecines douces, l'accompagnement psychologique ou les équipements non remboursés.
Les résultats de cette enquête révèlent une réalité souvent ignorée dans les débats sur notre système de santé. Ces restes à charge invisibles constituent un fardeau financier qui s'ajoute aux difficultés déjà rencontrées par les patients chroniques. Dans un contexte budgétaire contraint, il devient urgent de reconnaître l'existence de ces coûts cachés et de les intégrer dans la réflexion sur notre politique de santé, l'accompagnement psychologique ou les équipements non remboursés.