Comprendre le fonctionnement des mutuelles santé
Avant d'examiner les propositions de la mission d'information sénatoriale, il est utile de rappeler quelques principes de base sur le fonctionnement des organismes complémentaires d'assurance maladie (Ocam).
Comment les mutuelles gagnent-elles de l’argent ?
Les mutuelles, comme les sociétés d'assurance et les institutions de prévoyance, perçoivent des cotisations de la part de leurs adhérents. Elles utilisent cet argent pour rembourser tout ou partie des frais de santé non pris en charge par la sécurité sociale (ticket modérateur, dépassements d'honoraires, forfaits hospitaliers, etc.).
Les cotisations doivent être suffisantes pour couvrir à la fois les remboursements de soins et les frais de gestion des Ocam (charges de personnel, loyers, investissements informatiques...).
C'est pourquoi on assite régulièrement à une augmentation du coût de leurs cotisations, d'autant plus que les dépenses de santé progressent chaque année.
Quel est l'intérêt de prendre une mutuelle ?
Bien que facultative, l'assurance complémentaire santé est devenue indispensable pour accéder à certains soins coûteux comme l'optique, le dentaire ou les audioprothèses. Elle permet de diminuer le reste à charge, c'est-à-dire la partie des frais que l'assuré doit payer de sa poche après remboursement de l'Assurance maladie obligatoire (AMO).
Depuis la généralisation de la complémentaire santé d'entreprise, 96% de la population est désormais couverte par une mutuelle. Mais le niveau de garanties est très variable d'un contrat à l'autre. D'où l'importance de bien choisir sa complémentaire santé en fonction de ses besoins et de son budget.
La mission d'information du Sénat souligne aussi l'importance d'améliorer la lisibilité des tableaux de garanties pour aider les français à mieux connaitre leur niveau de garanties.
Quelles sont les obligations des mutuelles ?
Pour bénéficier d'aides fiscales et sociales, la majorité des contrats de complémentaire santé doivent respecter le cahier des charges du contrat responsable. Celui-ci encadre les niveaux de remboursements minimaux (ticket modérateur, forfait journalier hospitalier) et plafonne la prise en charge de certains dépassements (optique, honoraires médicaux).
Les contrats responsables doivent également prendre en charge intégralement et sans reste à charge un panier de soins dits "100% santé" dans trois domaines : les lunettes, les prothèses dentaires et les aides auditives.
Cette réforme progressive, achevée en 2021, a entraîné une augmentation du coût des remboursements pour les complémentaires santé.
Les propositions de la mission d'information du Sénat sur les complémentaires santé
Partant du constat que les hausses de cotisations sont de plus en plus difficiles à supporter pour les ménages, la mission d'information du Sénat a formulé 22 recommandations autour de 6 grands axes.
1) Frais de gestion des complémentaires santé : des efforts nécessaires
La mission d'information pointe du doigt l'augmentation du coût de gestion des Ocam ces dix dernières années, "sans que les explications (...) ne justifient pleinement cette évolution". Elle préconise donc de renforcer l'information des assurés sur ce poste de dépenses :
- en chargeant l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) d'instaurer "une classification des organismes complémentaires d'assurance maladie en fonction du niveau de leurs frais de gestion" ;
- en obligeant les complémentaires à communiquer chaque année à leurs adhérents le montant moyen de leurs frais de gestion exprimé "en euros par an et par contrat".
2) Contrats responsables : faut-il revoir leur périmètre ?
Jugeant nécessaire une refonte du contrat responsable pour répondre aux besoins des assurés, les sénateurs de la mission d'information suggèrent de :
- définir un socle de base, assorti d'un taux réduit de taxe de solidarité additionnelle (TSA), auquel pourraient s'ajouter des options soumises au taux normal de TSA ;
- rendre optionnelle la prise en charge des médecines non conventionnelles (ostéopathie, acupuncture, etc.).
3) Une nouvelle aide à la complémentaire santé pour les retraités modestes
Pour soulager financièrement les retraités les plus fragiles, la mission d'information propose de créer une "complémentaire santé solidaire senior" (C2S senior) sur le modèle de la CSS. Elle serait destinée aux personnes âgées dont les ressources se situent entre le minimum vieillesse et un plafond à définir.
Moyennant une participation "modeste de l'ordre de 2 euros par jour", cette aide publique constituerait le troisième étage de la protection sociale des retraités. En effet, les retraités sont en première ligne des hausses de cotisations avec les augmentations des mutuelles pour seniors.
4) Courtage en assurance santé : la nécessité d'un encadrement
Pour lutter contre "l'opacité de l'activité de courtage, source de mécontentement", le rapport de la mission d'information invite à :
- élaborer une convention-type entre les Ocam et les courtiers ;
- interdire certains modes de commissionnement agressifs comme le précompte escompté.
5) Lisibilité des garanties : un enjeu pour le pouvoir d'achat
Estimant que le manque de clarté des contrats ne permet pas aux assurés de choisir la couverture la plus adaptée à leurs besoins, la mission d'information recommande aux complémentaires santé :
- d'exprimer systématiquement les niveaux de garanties en euros et plus seulement en pourcentage de la base de remboursement de la sécurité sociale ;
- d'adopter un standard de présentation des garanties, intégrant ou non la part AMO.
6) Complémentaires santé et pouvoirs publics : renforcer le dialogue
Enfin, pour favoriser les échanges entre la sécurité sociale et les complémentaires santé, les sénateurs souhaitent faire du comité de dialogue avec les organismes complémentaires (Cdoc) une instance trimestrielle dont "l'ordre du jour et la feuille de route seraient définis conjointement par le gouvernement, l'Assurance maladie et les complémentaires santé".