ANI sur la santé au travail : des négociations complexes pour un accord timide
Il s’agit du premier accord national interprofessionnel (ANI) sur la santé au travail depuis 13 ans. Pour aboutir à ce texte, 6 mois de discussion ont été nécessaires, les travaux ayant commencé en juin dernier.
Le résultat est un texte qui a le mérite de mettre en avant le problème de la santé au travail et l’importance de la prévention.
Il ne s’agit pas d’un texte contraignant et normatif à la demande express des organisations patronales. Ce qui est également le cas de l’ANI sur le télétravail du 26 novembre 2020.
Or, pour rappel, ce type d’accord a pourtant eu vocation dans le passé à mettre en place des obligations légales. C’est d’ailleurs un ANI qui a instauré l’obligation pour les employeurs de souscrire une mutuelle d’entreprise pour leurs salariés en 2016.
Les principaux apports de cet accord interprofessionnel sur la santé au travail
Parmi les différents points traités par ce texte, on peut retenir la place majeure occupée par la prévention ainsi que le recours à la médecine de ville pour pallier au manque de médecins du travail.
Prévention et responsabilité des employeurs
L’un des points les plus négociés de cet accord porte sur la responsabilité des employeurs en matière de santé au travail. Les syndicats de salariés ont bataillé contre la proposition qui consistait à inscrire dans le code du travail une simple obligation de moyens pour les employeurs quant aux mesures de prévention. Concrètement, cela revenait à les exonérer de toute responsabilité dès lors que des mesures de prévention avaient été mises en œuvre au sein de l’entreprise.
Finalement, le texte ne contient qu’un rappel de la jurisprudence selon laquelle un employeur peut être réputé avoir satisfait ses obligations dès lors que des actions de prévention ont été mises en œuvre. Concrètement, ce rappel n’exonère pas les employeurs.
Il renvoie juste l’appréciation des mesures mises en place au juge qui pourra ainsi apprécier au cas par cas chaque situation et estimer si ces dernières étaient suffisantes ou non pour remplir l’obligation de prévention qui incombent aux employeurs.
Inclusion des médecins de ville dans le suivi des arrêts maladie et des reprises de poste
Un autre point traité par l’ANI porte sur le manque de moyens et d’effectif des services de santé au travail (SST) qui deviennent d’ailleurs des services de prévention et de santé au travail (SPST).
L’accord prévoit que des médecins de ville pourront faire passer les visites médicales de suivi et de reprise en cas d’arrêt de travail. Ces professionnels de santé devront être volontaires et avoir été formés pour de telles visites.
Mais cette solution ne doit pas avoir vocation à masquer la réalité actuelle de la médecine du travail qui peut être considérée comme le parent pauvre de la santé. Elle manque de praticiens : on compte actuellement 5 000 médecins du travail dont un grand nombre qui approchent de l’âge de la retraite. Elle dispose également de moyens limités pour réaliser un suivi vraiment efficace de la santé au travail.